Une exonération en cas de cession d’immeubles « qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession »
Pour s’en prévaloir, un contribuable doit pouvoir prouver l’effectivité de l’occupation de l’immeuble à titre de résidence principale. Si l’administration a un doute sur le respect de ces conditions, elle n’hésitera pas à remettre en cause l’exonération.
Il doit ensuite s’agir de la résidence principale au jour de la cession. Mais cette condition s’apprécie avec une certaine importante tolérance. En effet, l’administration indique dans ses commentaires officiels que :
(1) si le logement a été occupé jusqu’à sa mise en vente, l’exonération peut s’appliquer si la cession intervient dans des délais normaux. Pendant cette période, le logement ne doit ni avoir été donné en location ni avoir été occupé autrement.
(2) « Dans un contexte économique normal, un délai d’une année constitue en principe le délai maximal. Cependant, l’appréciation du délai normal de vente est une question de fait qui s’apprécie au regard de l’ensemble des circonstances de l’opération, notamment des conditions locales du marché immobilier, du prix demandé, des caractéristiques particulières du bien cédé et des diligences effectuées par le contribuable pour la mise en vente de ce bien ».
Un arrêt de la Cour administrative de Versailles (8 avril 2023, n° 21VE03104) fournit une intéressante illustration.
… Il faut parfois choisir entre l’exonération et un prix de vente élevé
La CAA a confirmé la remise en cause de l’exonération par l’administration fiscale, jugeant notamment que :
– le délai pour la cession “apparaît comme anormalement long”,
– le prix de vente “a été réduit trop lentement”
… dit autrement, la cédante n’a pas accompli les diligences nécessaires pour une cession rapide.
Le bien cédé était un hôtel particulier situé à Croissy-sur-Seine, que la requérante avait acquis avec son ex-époux. Ils ont mis en en vente cet immeuble dès 2009. Ils l’ont libéré en mars 2013 (date à laquelle la contribuable est partie s’installer à l’étranger). Finalement, le bien n’a été cédé qu’en octobre 2017.
Parmi les points à signaler :
– La cédante a mis le bien en vente en 2009 à un « prix de présentation » de 2,7 millions d’euros, la Cour relevant que ce prix était supérieur de 17,9 % au prix de cession.
– La Cour illustre la réduction trop lente du prix de vente, en relevant qu’il a été ramené à environ 2,5 millions d’euros de 2011 à 2015 (le prix restant fixé pendant une longue période « à un niveau encore supérieur de 7,86 % au prix de cession »), avant une nouvelle baisse, à 2,38 millions d’euros en 2016… et finalement une vente au prix de 2,29 millions d’euros fin 2017.
– La contribuable, partie résider à l’étranger en 2013, ne pouvait pas légalement prétendre à l’exonération totale à la date de la cession (mais à une exonération à hauteur de 150.000 euros de plus-value applicable dans ce cas)… mais elle estimait pouvoir bénéficier de l’exonération totale sur le fondement du droit de l’Union européenne notamment. Finalement elle perd toute exonération !
Dans cette affaire, on peut penser que la contribuable a eu raison de s’obstiner à vendre son bien à un prix qui a atteint 2,29 millions d’euros… même si la Cour l’a privée de l’exonération et semble avoir une idée bien différente du juste prix !
La CAA donne deux précisions assez surprenantes. La CAA semble reprocher à la contribuable de ne pas avoir proposé un prix bradé.
1°) “le prix d’acquisition de ce bien n’étant que de 960 868 euros, Mme A… n’avait pas de nécessité de maintenir un prix de vente aussi élevé”.
2°) au sujet de la difficulté d’évaluer un bien aussi particulier que l’hôtel particulier : « des pavillons situés dans le voisinage, ne constituant certes pas des hôtels particuliers mais d’une surface de 240 m2 à 363 m2 avec terrain, ont été vendus à des prix largement inférieurs, entre 956 500 euros et 1 360 000 euros ».